lundi 26 mars 2012

TEAM ONE - Episode 14

[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]

(Suite de l'histoire n°1) "Il rentra donc chez lui ; le reste de sourire qui animait ses lèvres n’avait rien de commun avec l’expression morne de ses yeux. Au bout d’une longue marche dans le froid, il poussa la porte d’entrée de son immeuble, aux gonds rongés par la rouille. Il s’apprêtait à entrer dans son appartement, quand il sentit une main sur son épaule. Il se retourna. C’était sa voisine, Mme Cohen, une femme d’une quarantaine d’année qui en paraissait bien plus, comme ces arbres des villes prématurément usés par les gaz des voitures. Ses cheveux frisés et fins moutonnaient autour de son visage aux traits tirés. Elle pria Salomon de bien vouloir passer chez elle. Elle avait quelque chose à lui dire. Il ne pouvait refuser, et s’achemina sous la lumière blafarde de l’ampoule du couloir. " (Alice Bé).


(Suite de l'histoire n°2) "Heinsenberg se força à sourire - que penserait de lui son client s'il découvrait que, sous son masque de sang-froid, il était glacé et terrifié par le noir et l'inconnu? La serrure grinça, la porte s'écarta, poussée par une main vieille, parcheminée, crochue. Heisenberg baissa les yeux et vit enfin le maître de maison, un homme petit, enveloppé dans une robe de chambre écarlate, trop grande pour lui, le visage triste, une lueur inquiétante au fond des yeux." (David M.).




(Suite de l'histoire n°3) "Je bondis de joie et me précipite sur mon téléphone. Le premier texto m'avait donné les moyens de découvrir l'identité de l'inconnu ; celui-ci me dira peut-être où se trouve Reinette ! Mais ma joie se dissipe en une fraction de seconde. Je ne comprends rien à ce message : "Le mouton paît sous l'arbre à mains, le chat mange sous l'établi." Pendant quelques minutes, je fixe l'écran de mon téléphone, complètement découragé. Qu'est-ce que cela peut bien signifier ? Je vais revoir le premier message, dans l'espoir d'y trouver un indice – et soudain, j'ai compris ! Je sais où il me faut aller !" (FG).


(Suite de l'histoire n°4) "Son père… Il revoyait sa main velue… dépassant d’une chemise blanche à fines rayures, avec, au poignet, une grosse montre dorée. La main de son père: celle qui pointait la bonne direction, celle qui étendait ses doigts, bienveillante, et passait dans ses cheveux longs d’enfant en une caresse réconfortante, celle qui approuvait, le pouce levé, ou désapprouvait, celle qui giflait quand on regardait sa mère dans la salle de bains par le trou de la serrure…" (Louis Butin).


(Suite de l'histoire n°5) "Etsuko fume des cigarettes chinoises dont l'odeur évoque celle du carton brûlé. Elle s'y est remise dès le lendemain de son retour à Tokyo, grâce à Daisuke, chez qui elle vit de nouveau. Sur la terrasse, au-dessus d'un bosquet de cryptomères aux troncs maigres, il lui a offert une Peace en marmonnant d'absurdes excuses sur le passé qu'il fallait oublier et le calumet des Indiens ; fugitivement, elle a pensé au laboratoire, à ses habitants — qu'elle s'est vue aussitôt noyer dans un baquet : oui, noyer, et le couvercle, et la corde, et hop au fond de l'eau : adieu, vous êtes morts. Daisuke lui a passé la main dans les cheveux, l'a embrassé plutôt maladroitement, elle l'a repoussé, c'est trop tôt. Mais le bonheur à fumer au-dessus des rues basses, en exhalant la fumée par les narines tandis que le ciel tourne à la nuit, ça !
Les ampoules colorées du Big Blue Red Yellow s'allument à sa troisième cigarette. Etsuko finit sa bière. Une femme passe avec deux chihuahuas en laisse. " (Dragon Ash).