mardi 17 avril 2012

TEAM TWO - episode 49

 [Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]


(Suite de l’histoire n°1) “Sa voix étouffée par l'épais matelas lui parvient à peine. "Si je savais comment tricher, je tricherais" répond-il. L'ampoule fatiguée de sa lampe de poche, faiblement soutenue par de mauvaises pile usées, produit un faisceau trouble et intermittent qui tranche péniblement l'obscurité poussiéreuse. Il croit voir une tache plus claire qui pourrait correspondre au dé mais répugne à étendre le bras pour s'en assurer. ” (Charles M)


(Suite de l’histoire n°2) “” (David M.)


(Suite de l’histoire n°3) “Alors toutes les dames pipi, parce qu'on n'est des filles qu'on impressionne pas aisément, on a décidé d'agir. Toutes ensemble, unis pour une fois, ça f'ra pas d'mal aux tontons tiens. On a fermé toutes les latrines à double tour. Fallait pas pousser, c'était le cas et le moment de le dire, on aime les jeux de mots et la gaudrioles, faut pas croire, on est des marrantes dans l'action. Pour qui qu'on nous prenait ? Pour qui ? On est allé se plaindre et on a fait la grève comme dans Lysistrata, avec des trucs qui coupent au bout des bras qu'on avait l'air méchantes comme des vraies méchantes. Les supérieurs, ils ont rien voulu entendre, faisaient la moue genre "pfiou" alors on a agit encore plus : on n'a pas cédé ! On est allé les chercher dans leur bureaux très stylés avec des sculptures d'animaux ou d'éphèbes à poils et au bout de leur cigares, on est allé voir plus bas et on a arraché deux ou trois organes genre "pfiou" qui z'étaient bien cachés dans des poches et des slips de grand-pères imbibés du rouge de leur sang avec leur poche ou des sac plus pervers avec des bouts de corde pour se faire mal parce que les supérieurs ils cachent des vices parce qu'ils ont le pouvoir et nous que l'écuelle sacro-sainte des dames pipi qui font du bruit quand on la secoue et on a cousu ça sur des fils noirs qu'on a balancé avec des langues en sus sur les rebords des fenêtres pleines de géraniums ou d'hibiscus que tout le monde applaudissait et que même d'autres femmes nous ont rejointes en longues files jusque dans tous les autres hôtels et restaurants qu'on a fermés à double tour et des pigeons et des oiseaux ont mangé des bouts et qu'y nous ont bien regardé dans les yeux. Des grappes de choses, de muqueuses sanguinolentes et gorgées de gaz, tiens, ça prend pas d's. Et on a r'gardé aussi. Ceux qui restaient ont commencé à pisser comme des chiens contre des murs que tout le monde disait que ça puait et que nous on répondait "si c'est des chiens, il ne reste plus qu'à ce qu'ils gueulent à la lune" et on riait parce qu'on était fortes et eux si faible. C'est pour eux qu'on cause mieux aux animaux : pour qu'y comprennent. "Tu le lèches, tu le lèches, arrache-toi les yeux, une tombe une tombe une tombe en forme d'écorce les rats lesrats lesratslesratslesratslesratslesratslesratslesratslesratslesratslesratslesratslesrats".Tant qu'à être bêtes, autant l'être totalement et puis pour deux ou bien cent et pis tant qu'à faire semblant, autant le faire bien. Avec les water closets, y z'ont plus pus faire. Alors ils ont commencé à se rabougrir. Nous ont saisissaient tout. Les dames pipi, vous savez, c'est pas bien des chiens : ça vaut plus que six filles réunies (pas la tortue). On connait les hommes, leur mauvais parfum ambré de trop, on les repère à dix lieues à la ronde : y'a une justice, nous on sent bon, une justice pour tous même pour eux. Même si la justice est faite pour et par eux. Toujours. On les aura. Nous les aurons. Et puis les condés sont passés, on a réouvert, on n'a pas eu le choix. On a traîné tant qu'on a pu et puis certaines têtes sont tombées, pour de vrai, au milieu des rues. Les caniveaux s'emplissaient de sang et les sangsues commençaient à sortir. On mettait les guirlandes des autres par dessus. Pour que les chairs se mélangent : on cherchait à les faire de nouveau enfanter... Certaines ont été en taule pour les guirlandes d'organes. Moi j'ai rien eu. Ou si peu. On m'a emprisonnée dans une forêt.

Il y'a une publicité sur le mur de la forêt qui monte sur le nord du tronc d'un pommier et qui montre une femme devant l'appareil ménager que vient de lui offrir son gentil et attentionné mari. Il y'a marqué : "Le cadeau idéal pour toutes les occasions". Moi je crois que le plus beau des cadeaux idéaux pour une femme, c'est d'être aimée pour de vrai. Ouais, d'être aimée, et pas qu'un peu. Un enfant. Qu'il lui donne un enfant qu'elle puisse étouffer.” (Alban Orsini)


(Suite de l’histoire n°4) “Que reste-t-il de Greta ?
Elle-même n’en est plus très sûre et, alors qu’elle déverrouille la porte de son appartement, un doute la saisit. Habite-t-elle bien ici ? Avec son jeu, la légèreté l’envahit, qui a chassé au loin toute préoccupation. Elle est désormais cette femme qui s’assoit au bar et qui sympathise avec des hommes, une femme qui s’affermit dans son subconscient et qui, déjà, détermine quel sera son rôle du lendemain. Pourquoi pas une femme forte, pour changer. Une créature magnétique, pas fatale, mais toute en pouvoir contenu, écrasant le monde comme elle martelle les rues, de ses talons aiguille. Une femme au maquillage appuyé, qui donnerait des ordres, « croque dans cette pomme Adam », une femme forte, une femme majuscule, raide comme la justice, une femme devant laquelle tous se plieraient.
A mesure que l’idée lui vient, Greta s’effraie un peu. Le rôle est ambitieux et elle ne pratique l’exercice que depuis deux jours. Mais elle a compris que, pour que son stratagème fonctionne, il fallait qu’elle s’immerge dès le réveil, que ses premières actions soient déjà celles d’une autre. Sa manière de bailler, de se lever, de se laver et bien sûr de s’habiller. Tous ces petits gestes qui contiennent plus de ces personnalités fictives que de longs discours ; elle travaille à partir des détails. Oui, elle sera cette femme stricte, en tailleur qui promènera son regard dédaigneux sur les hommes, les martyrisant d’un claquement de doigts, les récompensant d’une œillade. Il lui faudra encore un objectif, quelque-chose à faire de sa journée. C’est sans conteste une femme importante, à la tête d’une entreprise. Ou à un poste à responsabilités. Elle pourrait travailler avenue Montaigne. Elle a un poste exécutif pour les cognacs Hennessy. Elle a le palais sûr, elle a l’habitude d’en remontrer à tous, elle boit du cognac, et du champagne aussi - ce qu’elle préfère, ce sont les couleurs, la robe jaune intense du Grand vintage, la pâleur florale du Rosé impérial…
Allongée dans son lit, déjà, elle sent le breuvage humecter ses lèvres. Elle voudrait rêver de ce rôle, de cette femme qu’elle pourrait être, non, de cette femme qu’elle sera demain. Doucement elle bascule, sa tête glisse sur l’oreiller, ses yeux se ferment complètement. De petites bulles s’échappent de sa bouche, ça y est, elle nage, loin.” (Julien D.)


(Suite de l’histoire n°5) “Elle détacha la clé de son porte-clé, puis ouvrit le téléphone, en retira la batterie et y introduisit la clé qui s’y inséra parfaitement. Elle referma l’appareil et l’appliqua sur le cadenas. Celui-ci se mit à se balancer avec un vague grésillement, et « clic ! », la porte s’ouvrit. Maya sourit vaguement, et s’échappa dans le couloir décoré d’un papier peint défraîchi aux motifs fruitiers. « Ridicule », songea-t-elle avant de se glisser dehors, sous la lune pâle. ” (Juliette Sabbah)