mardi 3 avril 2012

TEAM TWO - Episode 5

[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]


(Suite de l'histoire N°1) "Elle lance les dés sur le parquet et sa main grande ouverte au centre du monde lui semble omnipotente, à même de renverser les fleurs et les étoiles dans un même mouvement fantasmé. Il passe la tête par dessus son épaule et cherche à connaître le résultat. On le distingue mal dans la vague clarté lunaire usurpée par l'aquarium. Il croit voir un six, et peut-être un trois." (Charles M.).



(Suite de l'histoire n°2) "Le vent agita les herbes hautes qui longeaient la route et le ciel se couvrit. Le moine reprit: “Jeune fou, il te reste une longue marche jusqu’au monastère. Je m’y rends aussi. Marchons ensemble. Si la nuit nous surprend, nous dormirons à la belle étoile, pour ne pas courir le risque de nous perdre dans ces bois.”" (David M.).



(Suite de l'histoire n°3) "Presque deux mois que je suis ici, dans cette forêt, pleinement occupée à y survivre de manière exaltée. Je ne regrette plus rien de mon ancienne vie : je suis catégorique. Et lucide. Parce que. Le bruit lancinant des voitures, des avions. Les babillages, les pétarades, les claquements, les hurlements. Ça strie les membranes. Tympans : ça atteint. Ici, j'ai le grand silence évocateur du ciel du jour, ainsi que la Lune et les étoiles de la nuit. Et à chaque fois, ils sont si fidèles. C'est une musique. Dans ma vie citadine , je recevais des cartes de voeux provenant d'agents immobiliers que je ne connaissais même pas et qui me souhaitaient une bonne année en arborant un sourire complice comme si nous étions amis depuis toujours. Ici j'ai une tortue. Vraiment... Dans mon ancienne vie, j'avais une maison et je passais mon temps à l'entretenir. Ici, je laisse à l'arc-en-ciel le soin d’épousseter la clairière, les arbres tout autour et de faire fuir la poussière qui s'accumule sous le petit pont avec des petits coups pertinents de vent qui secouent en nuages les vesses-de-loup. (Brume opaque, pestilence, cadavre). J'avais un métier aussi, qui consistait à communiquer. Ici, le seul que j'ai, c'est celui de profiter. Pendant ce temps, je joue au scrabble avec deux-trois bêtes qui s'avèrent très intelligentes. Ne venez pas me chercher. Vraiment. Oubliez-moi. Si on m'a mise là, c'est qu'il y a une bonne raison. Je commence à mieux la comprendre." (Alban Orsini).



(Suite de l'histoire n°4) "Igor aimait à dire que, de même que retourner une fleur la transforme en tortue, c'est quand tout est sans dessus dessous que le monde a presque l'air d'avoir un sens. Mais là, ça passait les bornes ! Tout alla très vite et très lentement. Par le hublot de l'avion chavirant, il vit un arc en ciel qui partait des étoiles et une pièce de scrabble lui tomba dans la narine ! Il y a des baffes qui se perdent ! La lune seule semblait indifférente au tumulte. La demeure des cieux au moins se se renverse pas, car ils ont la bonne idée d'être en perpétuelle révolution. Alors que l'avion entrait dans l'eau, ces réflexions cosmiques et suspendues rappelèrent à Igor que les vieux humains marchent sur trois pattes. " (008).



(Suite de l'histoire n°5) "L’avion s’était remis à secouer ; il piqua du nez, avant de remonter brusquement. Une atmosphère de panique se répandit dans l’appareil. Maya ferma les yeux, pensa au calme que cela serait de s’abîmer là, entre les satellites et les étoiles… La voix du pilote résonna dans le cockpit : « Attachez vos ceintures, les turbulences risquent de s’aggraver ». En un éclair, Maya songea à ces films-catastrophe où les passagers se retrouvent soudain la tête en bas, avant qu’un héros ne s’improvise pour sauver tout l’équipage ; un héros de carton-pâte, qui redressait l’appareil avec une canne et une équerre, pour le faire atterrir avec désinvolture au milieu de l’océan. « On dirait que je vais devoir m’y coller », murmura-t-elle. D’abord, réveiller le voisin. Elle tira de son sac une paire de gants en plastique et les enfila. " (Juliette Sabbah).